Como si nada

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Estaba sentado en el sofá con un libro entre las manos como si leyera, mientras yo revisaba mi correo al otro lado de la sala. Advertí que no lo hacía por el movimiento compulsivo de su pie izquierdo apoyado sobre su rodilla derecha. Tenía que decirme algo, podía presentirlo, pero no lo hacía. Quizás porque no encontraba las palabras adecuadas.

Tenía dificultades de expresarse cuando se encontraba frente a mí. Una vez me había dicho que yo era de esas personas que le hacían bajar la mirada. Había algo que le intimidaba. No era algo que venía de mí, me explicó en esa misma ocasión y con mucha claridad, sino de él. De pronto ante mis ojos perdía la percepción de sí mismo, se sentía como una sombra sin contornos claros, incapaz de definirse. 

Me disponía a sentarme al lado suyo cuando, de pronto, se puso de pie con una determinación desconcertante. Como si yo no estuviera ahí, se dirigió al armario del vestíbulo donde estaba su valija lista, la tomó y luego, se detuvo frente a mí. Vacilante, como una cuerda floja, su mirada se encontró con la mía. La acogí con los ojos redondos y humedecidos. Y con una lucidez tajante que me hizo estremecer, me dijo que tenía que marcharse, que temía que lo absorbiera y le quitara esa esencia suya que él mismo no lograba descifrar aún. No era que no me amara, solo que no quería desaparecer. Se dio la vuelta, atravesó la puerta y se fue. 

Comme si de rien n’était 

Il était assis sur le canapé du salon avec un livre entre les mains comme s’il lisait. Je compris qu’en réalité il ne lisait pas, par le mouvement compulsif de son pied gauche posé sur son genou droit. Il voulait me dire quelque chose, je pouvais le pressentir, mais il ne le faisait pas. Peut-être parce qu’il ne trouvait pas les bons mots.

Il avait toujours eu du mal à s’exprimer face à moi. Un jour, il m’avait avoué que j’étais de ces personnes qui lui faisaient baisser le regard. Quelque chose l’intimidait. Ce n’était pas quelque chose qui venait de moi, m’expliqua-t-il très clairement à cette même occasion, mais de lui-même. Tout à coup devant moi, il perdait la perception qu’il avait de lui, se sentait comme une ombre sans contours clairs, incapable de se dessiner. 

J’étais sur le point de m’assoir à côté de lui quand, soudain, il se mit débout avec une détermination déconcertante. Comme si je n’étais pas là, il ouvrit l’armoire de l’entrée où sa valise se trouvait déjà prête et il la saisit. Puis, il s’arrêta devant moi. Vacillant comme une corde, son regard rencontra le mien. Je l’accueillis avec des yeux ronds et humides. Et dans une lucidité tranchante, il me dit qu’il devait partir, qu’auprès de moi, il craignait de se perdre lui-même et de ne plus parvenir à se définir. Ce n’est pas qu’il ne m’aimait pas, mais il ne voulait pas disparaitre. Il me tourna le dos, se dirigea vers la porte, la traversa et partit. 

Revue de la traduction Aude Lafait